Medias
Journal & grilles Appli mobile Newsletters Galeries photos
Medias
Journal des Grignoux en PDF + archives Chargez notre appli mobile S’inscrire à nos newsletters Nos galeries photos
Fermer la page

Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Viens danser... sur la lune
de Kit Hood
Canada, 1997, 1h32

Le dossier dont on trouvera un extrait ci-dessous propose plusieurs approches différentes autour des principaux thèmes du film Viens danser... sur la lune, notamment le choix d'un style de vie, les relations entre les générations, le passage de l'enfance à l'âge adulte ou encore l'importance pour l'identité personnelle de l'apparence notamment vestimentaire. Il s'adresse d'abord aux enseignants et aux animateurs qui verront ce film avec un jeune public (entre neuf et douze ans environ)

Les vêtements, signes de l'identité

Comme tous les adolescents, Mady se cherche... Elle cherche à développer sa propre personnalité, pas très sûre encore de savoir qui elle est vraiment. Cette «indécision» par rapport à soi-même s'exprime bien dans cette phrase: «Parfois j'ai l'impression de venir d'une autre planète...»

Mais si elle ne sait pas très bien qui elle est, elle sait bien qui elle n'est pas. Aussi, Mady ne veut plus des robes héritées (en double exemplaire!) de ses cousines, les jumelles.

En effet, cette recherche de soi-même des adolescents se manifeste visiblement dans le choix des vêtements et dans l'inconfort que représentent pour eux des vêtements qu'ils n'ont pas choisis

Nous voudrions ici inviter les jeunes spectateurs du film à s'exprimer sur ce thème de la recherche de soi-même, et sur la manière dont elle s'exprime à travers l'apparence.

Le parcours vestimentaire de Mady

Le parcours personnel de Mady est bien visible à travers son apparence, ses vêtements et la manière dont ils traduisent le regard qu'elle porte sur elle-même.

Lorsque l'on fait connaissance avec Mady, elle porte des vêtements qui lui vont bien, dans lesquels elle se sent bien, qui sont à sa taille (par opposition au maillot de Sarah, par exemple, qui est légèrement trop grand pour elle). Mais pour la remise des prix, qui clôture l'année scolaire, Mady doit porter une «belle robe», une robe spéciale, une robe qu'on ne porte pas tous les jours. En l'occurrence, cette robe, Mady l'a reçue de ses cousines qui ne la portent plus. Elle semble un peu démodée à Mady qui se sent relativement godiche lorsqu'elle la porte. Cette robe qu'elle n'a pas choisie, ne correspond pas à l'idée que Mady se fait d'elle-même. De la même façon, Mady est un peu agacée lorsqu'elle trouve sur son lit un nouveau lot de robes héritées de ses cousines. Devra-t-elle vraiment porter ces vêtements qui ne lui correspondent pas?

Mady se montre ensuite assez curieuse des malles de sa tante Ruth et des vêtements et accessoires qu'elles contiennent. Là encore, ce sont les vêtements qui sont la marque la plus visible de la personnalité, voire de l'excentricité de Ruth (qui est plutôt exceptionnelle à différents points de vue).

Finalement, Mady se créera elle-même un costume en transformant une des robes insignifiantes [1] de ses cousines et en y ajoutant des accessoires prêtés par sa tante Ruth. Elle va ainsi trouver son propre style et sortir, pleine d'assurance, de la maison, sous le regard médusé des membres de sa famille [2]. Ainsi, Tim lui dit: «On dirait que tu viens d'une autre planète», à quoi elle répond: «Oh! Merci beaucoup!». Mady considère donc comme un compliment cette marque d'étonnement, ce qui montre aussi qu'elle est prête à accepter les «bizarreries» qui sont les siennes, ce sentiment d'étrangeté qu'elle éprouve souvent. Mady accepte et assume son caractère particulier.


[1] À moins qu'elles ne soient précisément «sursignifiantes», qu'elles ne «disent» des choses qui ne sont pas vraies à propos de Mady

[2] Mady passe donc de l'enfance à l'adolescence d'une manière particulièrement heureuse. D'autres films (Bienvenue dans l'âge ingrat de Todd Solondz ou La vie ne me fait pas peur de Noémie Lvovsky) montrent des adolescentes particulièrement mal fagotées et pour qui ce passage d'un âge à un autre ne se fait pas sans douleur.

Parler de sa propre expérience

Il n'est sans doute pas très facile pour les adolescents de parler de soi. Il est plus facile de parler de... choix.

Proposons aux jeunes spectateurs du film de partager leurs propres anecdotes en matière de vêtements, d'apparence. L'enseignant pourra ouvrir un tel échange en faisant la lecture d'un extrait de Léviathan, de Paul Auster, où un homme et sa mère évoquent un souvenir lié à une tenue vestimentaire et au désaccord des deux personnages à ce sujet.

Voici cet extrait  :

- Tu te souviens de ce jour-là, Benjy? a commencé Mrs. Sachs.

- Bien sûr, je m'en souviens, a fait Sachs. Ç'a été un des moments décisifs de mon enfance.

- Tu n'étais qu'un tout petit bonhomme à cette époque. Pas plus de six ou sept ans.

- C'était l'été de mes six ans. 1951.

- Moi j'avais quelques années de plus, mais je n'étais jamais allée à la statue de la Liberté. Je me suis dit qu'il était grand temps et un beau jour je t'ai fourré dans la voiture et on est parti pour New York. Je ne sais pas où étaient les filles ce matin-là, mais je suis à peu près sûre qu'il n'y avait que nous deux.

- Il n'y avait que nous deux. Et Madame Trucmuche-stein et ses deux fils. On les a retrouvés là-bas en arrivant.

- Doris Saperstein, ma vieille amie du Bronx. Elle avait deux garçons à peu près de ton âge. De vrais petits galopins, une paire d'Indiens sauvages.

- Des gosses normaux, simplement. Ce sont eux qui ont provoqué toute la bagarre.

- Quelle bagarre?

-  Ça, tu l'as oublié, hein?

- Oui, je ne me souviens que de ce qui s'est passé après. Ça a effacé tout le reste.

- Tu m'avais obligé à porter ces affreuses culottes courtes avec des chaussettes blanches. Tu me faisais toujours beau quand on sortait, et j'avais horreur de ça. Je me trouvais l'air d'une mauviette dans cet accoutrement, un Fauntleroy en grande tenue. C'était déjà pénible lors de sorties en famille, mais l'idée de me présenter ainsi devant les fils de Mrs Saperstein me paraissait intolérable. Je savais qu'ils seraient en T-shirts, en salopettes et chaussures de sport, et je ne savais pas comment les affronter.

- Tu avais l'air d'un ange, habillé comme ça, a dit sa mère.

- C'est possible, mais je n'avais pas envie d'avoir l'air d'un ange. J'avais envie d'avoir l'air d'un garçon américain normal. Je t'ai suppliée de me laisser mettre autre chose, mais tu as été inébranlable. Visiter la statue de la Liberté, ce n'est pas comme jouer dans un jardin, m'as-tu dit. Elle est le symbole de notre pays, et nous devons lui témoigner le respect approprié. Même alors, l'ironie de la situation ne m'a pas échappé. Nous nous préparions à rendre hommage au concept de liberté, et moi j'étais dans les chaînes. Je vivais sous une dictature absolue, et aussi loin que remontent mes souvenirs, mes droits avaient été piétinés. J'ai essayé de te parler des autres garçons, mais tu refusais de m'écouter. Ne dis pas de bêtises, répondais-tu, ils auront leurs beaux habits, eux aussi. Tu étais si fichtrement sûre de toi que j'ai fini par prendre mon courage à deux mains et te proposer un marché. D'accord, j'ai dit, je resterai comme ça aujourd'hui. Mais si les autres ont des salopettes et des baskets, c'est la dernière fois que j'y serai obligé. À partir de ce moment, tu me permettras de m'habiller comme je veux.

- Et je t'ai donné mon accord? Je me se suis laissée aller à marchander avec un gamin de six ans?

- C'était juste pour me calmer. Tu n'envisageais même pas l'éventualité de perdre ce pari. Mais voilà, lorsque Mrs. Saperstein est arrivée à la statue de la Liberté avec ses deux fils, ils étaient habillés exactement comme je l'avais prédit. Et c'est ainsi que je suis devenu maître de ma garde-robe. Ç'a été la première grande victoire de ma vie. J'avais l'impression d'avoir frappé un coup en faveur de la démocratie, de m'être dressé au nom des peuples opprimés du monde entier.

L'enseignant pourra ensuite évoquer lui-même un vêtement, des chaussures, une coiffure qu'il a profondément désirés étant enfant ou adolescent avant de laisser la parole aux élèves sur ce sujet.

Cette petite discussion permettra de faire la distinction entre d'une part des choses qui correspondent à l'identité, que l'on ressent profondément comme «une chose qui me convient, qui est faite pour moi» et d'autre part les choses que l'on désire... parce qu'elles sont à la mode, pour faire comme quelqu'un d'autre qu'on admire, etc.

Se dessiner tel que l'on voudrait être

Comme Mady se compose une tenue tout à fait originale pour se rendre au mariage, invitons les élèves à se représenter dans une tenue qu'ils ne possèdent pas mais qui corresponde à leur personnalité. Affichons la photo de Mady, fière, assurée et heureuse, lorsqu'elle sort de la maison pour rejoindre sa famille. Proposons aux élèves de se représenter d'une telle manière en commençant par coller leur photo d'identité sur une feuille de dessin. Il ne leur reste plus ensuite qu'à se dessiner un costume «idéal».

Invitons ensuite les élèves qui le désirent à décrire leur tenue (vêtements, chaussures, accessoires...). Affichons ensuite les dessins et laissons la parole aux élèves qui désirent les commenter.

Bien sûr, lorsque les enfants prendront la parole, on veillera à ce que tout le monde écoute et à ce que les commentaires ne donnent pas lieu à des jugements de valeur.

Se prendre pour un créateur de mode

Dans l'exercice précédent, on s'est composé un costume «idéal». Proposons maintenant aux élèves un exercice de création plus libre. Il s'agira d'imaginer un costume original (mais qui ne corresponde pas spécialement à soi).

Cette création peut prendre différentes formes: on peut proposer aux enfants de dessiner un modèle, d'habiller une poupée «en excentrique» ou encore de transformer un vêtement existant et de le porter ensuite

La contrainte ici sera de présenter une tenue originale mais pas complètement fantaisiste. On pourra présenter cette consigne par une formule comme «Excentrique mais pas ridicule» ou encore «Original mais pas carnaval»

Ici encore, on exposera les créations et on invitera les élèves à les commenter. On pourra donc prolonger l'exercice par une discussion autour des goûts et des limites entre ce qui est «convenable» et ce qui ne l'est pas...


Tous les dossiers - Choisir un autre dossier