Pas de séances programmées pour ce film dans nos salles pour l'instant.
Réel buzz au dernier festival de Cannes où il était présenté dans la sélection « Un certain regard », Rafiki est un premier film kenyan qui se distingue tant par son audace scénaristique – en traitant de l’homosexualité dans un pays où celle-ci est encore taboue –, que par son portrait contemporain d’un pays que l’on connaît peu
Dès les premières minutes du générique, nous voilà projetés dans les vibrations colorées de Nairobi, la capitale kenyane, avant de découvrir, dévalant les rues sur son skateboard, l’une des protagonistes principales, Kena.
Kena a 18 ans, vient d’obtenir son diplôme d’école secondaire et voudrait entamer des études de médecine. Elle est un rien garçon manqué, joue au foot avec les mecs et refuse sans arrêt les avances d’un de ses compagnons, lui promettant la belle vie si elle devient sa femme. Elle est en fait secrètement sous le charme de Ziki, une jeune fille pleine de punch, légèrement maniérée mais qui dissimule une réelle sensibilité. Les deux filles vont apprendre à se connaître et, au fur et à mesure de leurs rendez-vous furtifs, tomberont amoureuses l’une de l’autre. Mais, en plus d’être la proie de nombreux commérages, leur relation est menacée par le conflit existant entre leurs pères, tous deux se présentant aux élections locales dans des partis opposés. Forcées de vivre leur amour en secret, les deux jeunes filles vont devoir faire un choix décisif : assumer leur identité et tenter de secouer les étroites mentalités de leur village ou renoncer à une histoire qui risque de se retourner violemment contre elles…
Pour apprécier cette œuvre à sa juste valeur, il est bon de rappeler le parcours du combattant qu’a traversé la réalisatrice pour faire son film : sept ans de pré-production pour trouver les financements et avoir les autorisations nécessaires au tournage, sans compter les réelles prises de risques pour elle et ses actrices dans un pays où l’homosexualité est interdite et où le film reste jusqu’à présent censuré. Mais si cette atmosphère hostile est bel et bien présente dans le film, incarnée notamment dans le discours de l’Église ou les cancans abjects du voisinage, ce n’est pas ce qui nous frappe en premier lieu. La réalisatrice a en effet préféré mettre l’accent sur la jeunesse kenyane, pleine de fougue, qui fait bouger les lignes du pays de l’intérieur et dont elle fait indéniablement partie.
Le look des deux protagonistes, la bande-son, le graphisme pop du générique viennent couronner l’incandescence de cette nouvelle vague du cinéma africain.
Alicia Del Puppo, les Grignoux
