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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Looking for Eric
de Ken Loach
Grande-Bretagne/Belgique/France, 2009, 1h59

Le dossier pédagogique dont on trouvera un extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants du secondaire qui verront le film Looking for Eric avec leurs élèves (à partir de treize ans environ) mais également aux animateurs qui souhaitent exploiter la vision de ce film avec un large public. Il contient plusieurs animations qui pourront être rapidement mises en oeuvre en classe ou dans un groupe après la vision du film.

Explorer les thèmes du film

Si certains films ont pour but de divertir le spectateur ou de l'inviter à réfléchir sur un sujet, d'autres délivrent un message, mais il arrive fréquemment bien sûr que les intentions de l'auteur soient multiples et c'est certainement le cas de Looking for Eric. En effet, il ne fait pas de doute que Ken Loach et son scénariste Paul Laverty, ainsi qu'Eric Cantona lui-même (qui est le producteur et l'initiateur du film) aient souhaité divertir le public avec une histoire tour à tour drôle, émouvante et non dénuée de suspense, mais aussi évoquer le monde du foot, la transformation des valeurs de la société, et enfin délivrer un message.

Dans un cadre pédagogique, il est pertinent d'analyser le discours complexe que constitue le film. En effet, le récit du film comporte différentes dimensions, aborde différents sujets et mêle différentes intrigues. Invitons les spectateurs du film à «ordonner» ces divers éléments.

Concrètement, proposons aux participants de s'attacher à trois thèmes définis arbitrairement:

  • Le football
  • Le conflit des générations
  • La dépression

Invitons les participants à s'organiser en trois groupes qui s'attacheront chacun à l'un de ces thèmes.

Il s'agira alors de répondre à une question très simple: que nous dit le film de Ken Loach de chacun de ces thèmes?

Chaque groupe élaborera une réponse à cette question en rassemblant les souvenirs du film en relation avec le thème de manière à synthétiser le propos de l'auteur sur la question.

Ce travail de réflexion des participants peut être confronté ensuite aux commentaires suivants (seuls les deux premiers encadrés sont reproduits sur cette page web).

Le football

Le football est la passion d'Eric Bishop et Eric Cantona est son idole. Les meilleurs moments de la vie d'Eric sont associés au football, qu'il s'agisse des formidables actions de Cantona qui sont toujours très présentes dans le souvenir d'Eric, ou des moments partagés entre supporters, notamment avec sa propre fille Sam. Ce sont en effet les images de ces événements qui apparaissent quand Eric se rappelle douloureusement la question du psy: «quand avez-vous été heureux pour la dernière fois?» Le bonheur que représente le football pour Eric est évoqué également quand, avec Cantona, il rappelle toutes les émotions que l'on peut vivre dans un stade, vu comme un espace de liberté: au foot, on peut crier, rire et exploser sans se faire arrêter. On peut aussi y pleurer et les hommes peuvent même s'embrasser.

Le football est aussi un lieu de rassemblement. Si Eric ne va plus au stade depuis longtemps, il assiste toujours aux matches, au pub, avec ses amis. Là, les supporters évoquent le sentiment d'appartenance: «tu peux changer de femme, tu peux changer de religion, mais tu ne peux pas changer de club de foot». Sous cette formule efficace se cache l'idée de loyauté et de camaraderie. Ce sont des liens d'amitié qui rassemblent les supporters et quand les amis d'Eric viennent le chercher pour aller voir le match, Cantona dit à Eric d'y aller et finit sa phrase par «Lucky man»: Eric a de la chance d'avoir des amis.

Un autre aspect du football est abordé lors de cette discussion au pub: l'évolution «économique» du foot. En effet, les tickets pour accéder au stade sont devenus de plus en plus chers et ce qui était auparavant un sport populaire est devenu un spectacle «pour les riches»: «le parking ne ment pas, il n'y a que des grosses voitures à l'entrée du stade». Les supporters les moins fortunés en sont réduits à voir les matches à la télévision, qui sont diffusés sur des chaînes payantes . De la même manière, Ryan est en quelque sorte rémunéré (pour garder l'arme de Zac) en étant invité dans une loge où il pourra voir le match en buvant du champagneŠ tout cela associe le football à une image de produit de luxe, réservé aux plus fortunés.

Mais pour Eric Bishop, le football est encore plus que tout cela: c'est un modèle à suivre. En effet, quand on l'invite à s'identifier à un personnage charismatique, auquel il voudrait ressembler, quelqu'un qui se distingue par sa confiance en soi, Eric nomme Cantona. Le célèbre footballeur est pour lui un modèle de confiance donc, mais aussi de fierté, d'audace, d'imagination, autant de qualités dont Eric n'a pas vraiment fait preuve dans son existence. En instaurant un dialogue imaginaire avec lui, Eric va s'inspirer de ses maximes pour introduire des changements dans sa vie. Particulièrement, il va faire sienne l'idée d'esprit d'équipe que Cantona lui souffle avec des phrases comme «Il faut toujours faire confiance à tes coéquipiers, sinon tu es foutu» ou «Mon plus beau souvenir, ce n'était pas un goal, c'était une passe».

Ainsi, dans l'ensemble du film, il se dégage du football une image aux multiples dimensions: d'une part, un sport populaire «perverti» par l'argent; d'autre part, un sport qui pourrait être la métaphore d'une vie exemplaire où domineraient l'esprit d'équipe et la confiance en autrui, mais aussi l'audace, la générosité et le panache.

Le conflit des générations

Par «conflit des générations», l'on entend généralement le fait que des personnes d'âges différents ont des attentes, des valeurs, des représentations différentes, en raison de l'éducation qu'elles ont reçue et des transformations de la société dans laquelle elles évoluent. Ces attentes, valeurs ou représentations se trouvent particulièrement en opposition dans le cadre de la famille où les parents sont responsables de l'éducation et des actes de leurs enfants.

Ce conflit est particulièrement bien illustré dans le cas d'Eric Bishop et de ses deux beaux-fils.

Particulièrement, au début du film, quand Eric rentre chez lui après son accident, les indices sont nombreux qui montrent qu'Eric n'est plus «maître chez lui»: des jeunes gens qu'il ne connaît pas sortent de sa maison; le couloir est rempli d'objets inconnus qu'il soupçonne d'avoir été volés; une jeune fille lui demande qui il est, comme si c'était lui l'étranger dans la maison; des «invités» dorment dans la chambre de Jess en pleine journéeŠ Seule sa propre chambre à coucher semble lui appartenir.

Alors qu'Eric vit comme un devoir d'aller travailler (à l'hôpital, dans un demi-sommeil, il dit qu'il doit se lever pour aller au travailŠ), Ryan vit de petits trafics et Jess sèche les cours sans le moindre état d'âme. (Les garçons semblent posséder beaucoup d'objets ‹ ordinateurs, télévisions, téléphones portablesŠ ‹, mais on ne les voit jamais travailler; à leur âge, Eric avait économisé une semaine de salaire pour s'offrir une paire de chaussures en daim bleuŠ)

Là où Eric était dominé, presque traumatisé par son père, Ryan et Jess ignorent Eric: ils ne répondent pas à ses interpellations ou se contentent d'un «C'est bon!» révélateur: ce qui contrarie Eric n'est pas un problème pour eux. La maison envahie d'objets sans doute volés, les télévisions allumées dans toutes les pièces, le désordre généralisé: tout cela dérange Eric mais laisse les garçons totalement indifférents.

Cet éloignement entre le beau-père et les beaux-fils date sans doute de l'adolescence des seconds. En effet, après qu'Eric a vu Ryan se faire frapper par Zac, il lui demande ce qui se passe, mais le jeune homme refuse de répondre. «Avant, on se disait tout» regrette Eric. Quand Ryan prétend que Zac est un ami, Eric s'étonne et dit qu'avec ses amis à lui, il rigoleŠ Dans ce simple échange, ce sont les valeurs des deux personnages qui s'opposent. Comme si la notion de l'amitié telle que la connaît Ryan était pervertie par l'argent.

D'une manière générale, Jess et surtout Ryan semblent simplement coexister avec Eric, sans avoir plus rien à partager avec lui. Comme s'ils étaient désormais des adultes, à qui le beau-père n'a plus le moindre mot à dire. Comme si le simple fait de ne pas savoir ce qu'est Youtube le disqualifiait comme interlocuteur valableŠ Aussi sont-ils extrêmement surpris quand celui-ci réagit en faisant enlever tous les postes de télévision de la maison, quand il s'entraîne à dire «Non!», quand il ne cuisine plus que pour lui seul, et surtout quand il prend les choses en main face aux ennuis de Ryan. Les jeunes et Eric ne renoueront effectivement les liens que quand Eric prendra des risques pour eux: quand il revient de son éprouvante rencontre avec Zac, les garçons l'attendent avec une grande inquiétude. Ensuite, ils seront sincèrement heureux d'apprendre qu'Eric a changé l'arme de cachette, ce qui témoigne de l'engagement d'Eric auprès de ses beaux-fils: il est clair qu'il est «avec eux» dans la tourmente. Enfin, quand Eric mènera l'opération Cantona qui résoudra le problème, Ryan et Jess manifesteront une gratitude sincère qui les encouragera à faire à leur tour quelque chose pour leur beau-père: tout expliquer à Lily.

Ainsi, les différences de jugements entre Eric et ses jeunes beaux-fils prennent moins la forme d'une confrontation que d'une indifférence des uns envers l'autre. Comme s'ils n'avaient plus rien à se dire, comme s'ils ne vivaient pas dans le même monde. Là où Eric accorde beaucoup d'importance au devoir, au travail, à l'amitié, ses garçons sont surtout attirés par l'argent facile, les produits de consommation, le luxe, les privilèges...

La dépression

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