Prix du Jury au Festival du Cinéma Américain de Deauville
Plongée choc dans le monde du porno hollywoodien, Pleasure apporte sur le grand écran les coulisses de cette industrie prospère mais abjecte, où la dignité des actrices est loin d’être respectée…
Passé par les festivals de Sundance et Deauville (il a remporté le Prix du jury de ce dernier), et porteur du label Cannes 2020, Pleasure appartient à cette catégorie de films audacieux et provocateurs qui n’ont de cesse de cliver les publics et à propos desquels on aime se faire son propre avis.
S’il dénonce toute la puanteur d’une industrie créée par des hommes pour exciter les hommes tout en exploitant et en humiliant les femmes, Pleasure le fait avec un certain aplomb, mettant en scène une jeune héroïne dont l’ambition est de devenir la plus grande star du X de Los Angeles.
Bella Cherry (son nom de scène) débarque de Suède avec une seule idée en tête, se faire un nom dans le milieu et augmenter sa cote sur les réseaux sociaux. À l’agent de sécurité de l’aéroport qui lui demande le motif de son séjour aux États-Unis, Bella répond avec assurance : « pleasure » (soit « pour le plaisir »).
De plaisir, il en sera pourtant peu question, et le parcours de cette jeune performeuse en est une rude illustration. Pour accéder aux tournages professionnels plus gratifiants, Bella doit d’abord accroître sa popularité et accepter les projets racoleurs, ceux qui engendrent le plus de clics, mais qui sont souvent les moins favorables en termes de conditions de travail, d’autant plus pour les débutantes. La violence qu’elle rencontre sur les tournages (et qui ne nous sera d’ailleurs pas épargnée) va drastiquement s’accroître…
La réalisatrice Ninja Thyberg a choisi d’exposer ces scènes de sexe de manière brute, crue et parfois frontale, jusqu’à l’écœurement, à l’image de la réalité de ce milieu qui ne prend pas de pincettes avec le corps des femmes, alors que celui-ci demeure l’objet principal de son fonds de commerce. Suscitant au passage un certain malaise, Pleasure a le mérite de rendre visibles les terribles rouages de cette industrie et toute la laideur humaine sur laquelle elle prospère.
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux