Le surréalisme du peintre espagnol ne pouvait qu’intéresser le cinéaste de Fumer fait tousser, spécialiste lui aussi de la confusion entre le réel et l’onirique. Une nouvelle fois, Quentin Dupieux nous installe dans un univers fascinant au sein duquel chaque séquence fait l’étalage d’un imaginaire créatif particulièrement débordant
Une journaliste française rencontre Salvador Dalí à plusieurs reprises pour un projet de documentaire…
À peine le temps de digérer l’excellent Yannick (sorti l’automne dernier) que Quentin Dupieux revient déjà avec un nouveau film, le onzième en treize ans, ce qui en fait le cinéaste français le plus prolifique de sa génération. Cette statistique ne doit pas faire d’ombre à la qualité de l’œuvre qui ne cesse de se bonifier avec le temps, de gagner en cohérence formelle.
Dans Daaaaaali !, afin de rendre hommage aux multiples facettes du peintre, Quentin Dupieux choisit cinq comédiens qui l’incarnent dans de petites séquences loufoques qui s’enchaînent et se répondent, jusqu’à ce que l’on ne se rende plus compte que l’on passe de l’un à l’autre. Le film est un délire mis en scène avec rigueur et minimalisme, dont chaque plan ressemble à une toile du peintre. Quentin Dupieux questionne la mise en scène et l’écriture du scénario pour faire en sorte que l’expérience vécue par le spectateur soit totale, envoûtante, spectaculaire mais pas déstabilisante. On se sent si bien dans ce film étrange et déroutant… À chaque séquence, on est subjugué par l’audace et l’inventivité, on prend du plaisir à vivre une expérience de cinéma permanente. On se retrouve parachuté dans un film à la fois cérébral et physique, ambitieux et simple. Le scénario ressemble à un long rêve dans lequel la cohérence est accessoire, mais où par contre le désir de découvrir un monde inconnu est primordial. Où sommes-nous ? Que sommes-nous en train de voir ? Un documentaire sur une journaliste qui veut faire une interview de Dalí ? Peu importe, vraiment. Le meilleur est de ne pas se poser de question et de se laisser embarquer comme dans un voyage sans fin.
Avec ce portrait non-conventionnel de Dalí, Dupieux aura aussi réfléchit à la manière d’approcher un artiste et son œuvre, en essayant de faire fusionner sa vision de réalisateur avec celle du peintre, en toute décontraction.
NICOLAS BRUYELLE, LES GRIGNOUX