Entre la chronique familiale et le récit initiatique, 20.000 espèces d’abeilles est un film d’atmosphère qui s’accroche aux détails, porte une attention révélatrice à la nature et qui, finalement, nous émeut dans sa simplicité. Ours d’argent au Festival de Berlin 2023
Cocó, 8 ans, a bien du mal à savoir qui elle est. Au cours d’un été passé parmi les ruches du Pays basque, elle éveille sa singularité au sein des femmes de sa famille, elles-mêmes en proie au doute. Dans un monde où il existe 20.000 espèces d’abeilles différentes, il existe forcément une identité qui corresponde à Cocó…
Cocó est une enfant transgenre, pas encore tout à fait sûre de qui elle est, ni de ce qui lui correspond. Née Aitor et assignée garçon à la naissance, elle est encore bien trop jeune pour mettre les bons mots sur ses sensations. Nous comprenons simplement par les détails, par cette manière sensible qu’a la réalisatrice de la regarder et de filmer le monde autour d’elle, qu’il y a un trouble au cœur de son identité, dont le point de tension est de plus en plus prégnant.
La cinéaste fait preuve d’une grande délicatesse dans sa manière de raconter l’éclosion de sa jeune héroïne, insinuant de la poésie et beaucoup de douceur dans cette trajectoire intime, enracinée ici dans le flux de la nature environnante. On est particulièrement touché par le personnage de cette tante apicultrice qui, la première, regarde Cocó en la voyant réellement, ayant sur elle le même regard que celui qu’elle pose sur la nature, présumant que les éléments qui la composent sont là tels qu’ils sont et non tels qu’ils sont supposés être.
C’est dans ce même mouvement aérien qu’évolue le film, portant une attention toute singulière aux paysages et traditions du Pays basque espagnol, aux dynamiques familiales qui courent sur plusieurs générations et, surtout, à cette enfant aux prises avec son existence, et qui attendrait juste des adultes qu’ils puissent l’accompagner…
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux