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Festival de Cannes : prix d’interprétation masculine pour Jesse Plemons
Moins d’un an après la sortie de Pauvres créatures et le succès qu’on lui connaît, le cinéaste grec Yórgos Lánthimos signe une œuvre en trois segments explorant les vicissitudes de l’âme humaine. En compétition cette année au Festival de Cannes où l’acteur Jesse Plemons a remporté le prix d’interprétation masculine !
Qu’est-ce qui rassemble ces trois sketchs imaginés par Lanthimos et son scénariste Efthymis Filippou ? D’abord, il y a sa troupe d’acteurs et actrices (Jesse Plemons, Emma Stone, Margaret Qualley et Willem Dafoe en tête) qui, d’un film à l’autre, reviennent et interprètent différents personnages tous plus étranges les uns que les autres. Et puis il y a cette « certaine bonté », formule ironique traduite du titre pour signifier justement un monde où celle-ci aurait été tout à fait éradiquée...
Mais dans quel monde sommes-nous au juste ? Un monde sec, aseptisé, où les êtres humains semblent avoir perdu toute once, non pas d’humanité, mais plutôt d’émotions ou d’empathie, et répondent à d’autres types d’injonctions dont l’anomalie demeure l’un des attraits principaux du film. Dans le premier sketch, un homme – définit dans le synopsis comme « sans choix » – se laisse dicter ses actions par un autre dont les demandes deviennent de plus en plus limite d’un point de vue moral. Dans le deuxième, un policier retrouve sa femme disparue en mer depuis de longs mois, mais celle-ci lui laisse une impression fausse qui le plonge dans une paranoïa aigue. Enfin, dans le dernier, deux personnes sont en quête d’une troisième censée devenir leur mentor spirituel.
Durant 2 h 45 le film nous plonge dans son univers décalé, ses situations tordues, ses relations carrément bizarres voire parfois inquiétantes. Mais il déploie aussi son humour détonnant, qui surgit furtivement hors de
ce chaos trop bien organisé, où l’idée d’une déroute totale de l’humanité côtoie une mise en scène clinique superbement huilée. Les actrices et acteurs, toutes et tous américains, semblent trouver dans l’univers du cinéaste grec, un terrain de jeu incroyable pour pousser leur folie à des niveaux supérieurs. Qu’il s’agisse de scènes choc, de nudité, d’entrave à la bienséance ou parfois même d’incursion dans le gore, ils et elles ont ici tout le loisir d’explorer une dimension de jeu délirante dans laquelle le cinéma hollywoodien ose peu souvent les aventurer.
Il y a dans cette nouvelle production du cinéaste quelque chose de plus sectaire, d’insaisissable et même d’humainement confrontant qui la rend peut-être plus exigeante et moins immédiatement attachante que la précédente. Il n’en reste pas moins que Yórgos Lánthimos est un réalisateur qui sait comment troubler son public, lui offrir des images fortes et des instants de pure jouissance cinématographique qui font de
lui l’un des cinéastes les plus stimulants d’aujourd’hui !
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux
