Huit ans après Notre jour viendra, Romain Gavras propose une relecture pleine d’autodérision des grands films de gangsters, Scarface en tête !
Mais n’est pas Toni Montana qui veut. Et François (Karim Leklou), petit dealer de seconde zone que l’on rencontre au début du film, n’a qu’un rêve : quitter le monde des embrouilles, dans lequel il a été embarqué malgré lui par une mère trafiquante (géniale Isabelle Adjani), et monter sa propre affaire, en l’occurrence, devenir le distributeur officiel de Mr Freeze au Maghreb. Mais quand il découvre que sa mère a joué et perdu toutes ses économies, il va devoir envisager une dernière mission… Le voilà donc parti pour Benidorm, station balnéaire espagnole bling-bling, où il est censé récupérer une belle cargaison de cannabis. Bien évidemment, rien ne va se passer comme prévu, et ce n’est pas le groupe de pieds nickelés embarqué avec lui qui va l’aider à s’en sortir. Parmi eux, un ancien beau-père tout juste sorti de prison (Vincent Cassel à mille lieues de son charisme naturel), une ancienne petite copine pas très fiable et deux jeunes caïds toujours prêts à dégainer. Sans oublier les prestations bonus de François Damiens en nouveau-riche redéfinissant les frontières de l’esclavage et Philippe Katerine en avocat en avocat escorté par un gang de Blacks à la crête peroxydée.
On connaissait le Romain Gavras faiseur d’images – il a notamment réalisé les clips de la chanteuse M.I.A ou du groupe Justice – et féru d’humour trash – c’est l’un des fondateurs du collectif Kourtrajme avec Kim Shapiron –, le voilà donc aujourd’hui cinéaste, livrant un film nourri de pop-culture, à l’image soignée, dont le scénario et les dialogues (souvent hilarants) ne s’essoufflent jamais. Si le film n’est pas exempt d’une certaine violence (la petite mafia de banlieue, ça ne rigole pas), celle-ci se fond totalement dans l’univers de ces petites frappes branques, dont chacun des plans se révèle toujours plus foireux. Et puis, l’air de rien, Le monde est à toi s’inscrit aussi dans un monde empreint de modernité et nous suggère en arrière-plan que, quelquefois, sortir de son milieu, fuir la violence, se garder d’être bête et méchant, est parfois plus compliqué que de s’y adapter.
©Les Grignoux - Alicia Del Puppo