Un documentaire salutaire sur les aides ménagères, ces femmes de l’ombre dont l’indispensable et difficile travail est encore trop souvent déconsidéré
Certaines d’entre elles ont été éducatrices, enseignantes ou aides-soignantes ; d’autres n’ont pas fait d’études. La plupart ont travaillé au noir. Même si, il y a une quinzaine d’années, le système des Titres-Services a permis de régulariser leur emploi et leur a donné un vrai statut professionnel, elles sont encore trop souvent victimes de clichés méprisants, comme si ce travail n’exigeait ni compétence ni qualification !
Aujourd’hui, elles sont près de 165 000 en Belgique à exercer ce métier qui reste pénible physiquement et socialement, et où les maladies professionnelles sont aussi nombreuses que les conditions de travail (salaires, horaires, etc.) restent précaires.
Un métier qui les rend fières, mais dont les client·e·s ignorent souvent ce qu’il implique, alors même que les aides-ménagères sont devenues, pour beaucoup de familles, un pilier de leur équilibre.
Agnès Lejeune et Gaëlle Hardy, les deux réalisatrices, ont suivi dans leur quotidien plusieurs de ces femmes, leur donnant – enfin ! – la parole. Tour à tour, Béatrice, Christel, Francine, Rosalie, Marie-Virginie, Laurence, Nermina et Sabine évoquent la charge physique et l’usure des corps ; leurs ambitions dans le travail et leur volonté ou non d’en changer ainsi que la confrontation à l’univers intime de leurs clients et leurs rapports avec ces derniers. Sans oublier un regard lucide et acéré sur la représentation de leur travail dans la société et la place qu’elles y occupent.
En captant également quelques moments de vie familiale et sociale, les réalisatrices situent les personnages dans leur environnement personnel, mais c’est surtout à travers leurs gestes et postures au travail que les personnes filmées se constituent. Les réalisatrices, comme les protagonistes, veulent éveiller les consciences ! Les unes après les autres, nos huit aides-ménagères interpellent la caméra, témoignent d’un souvenir ou d’une situation emblématique, frappant le spectateur qui ressort touché par la vitalité et l’acuité de ces femmes, par l’énergie qu’elles mettent à changer notre regard sur leur travail.
Au bonheur des dames ? est un film militant dans son sens le plus noble, porté par la dignité de ces femmes en mouvement.
Gauthier Jacquinet, les Grignoux
Vu dans la presse :
AXELLE, mensuel féministe belge : « Au bonheur des dames ? » : Titres-services, la parole des invisibles
FLAIR : « Au bonheur des dames », le docu qui casse les préjugés sur le métier d’aide-ménagère »